Méthodologie
Notre méthodologie s’appuie sur les critères utilisés dans la Scorecard de l’American Medical Student Association (AMSA), ainsi que par Shnier et ses coauteurs [1,3].
Une liste de 37 facultés de médecine françaises a été tirée du site web de l'ISNCCA (Inter-Syndicat National des Chefs de Clinique Assistants des hôpitaux de villes de facultés) [24].
En mai 2015, nous avons consulté le site web de chaque faculté de médecine à la recherche d’informations sur les politiques en rapport avec les conflits d’intérêts, et de documents qui actualiseraient des politiques en utilisant les termes : « conflits d'intérêts », « liens d'intérêts », « industrie pharmaceutique », « laboratoire pharmaceutique », « charte » et « règlement intérieur ». Nous avons alors noté le nom de chaque politique et la date la plus récente d’adoption ou de révision de cette politique.
Une lettre recommandée a été envoyée à chaque bureau de Doyen de faculté de médecine pour l’informer de notre étude. Cette lettre présentait le but de la recherche et les critères sur lesquels nous demandions de la documentation. Elle demandait confirmation de la pertinence de ces critères pour chaque faculté, et si aucune politique existante avait pu être oubliée. Notre lettre mentionnait aussi le fait que notre exploration des sites web des facultés de médecine n’avait permis de mettre au jour aucune politique, puisque tel était le cas pour les 37 facultés. Cela donnait au bureau du Doyen la possibilité d’apporter une correction si nous avions oublié une politique existante, et de nous envoyer des informations sur tout projet de politique non encore mise en place.
Nous avons aussi informé les bureaux des Doyens que nous ne nous intéressions qu’à des politiques effectivement rendues publiques, et que, même si les noms des répondants devaient rester confidentiels, les facultés de médecine et leurs politiques seraient identifiées dans toute publication sur le sujet. Nous avons joint deux lettres de recommandation : la première de Barbara Mintzes, co-auteur de l’étude de Shnier et al. évaluant les politiques des facultés de médecine canadiennes [3], et éditrice du manuel d’enseignement Understanding and Responding to the pharmaceutical promotion [25], et la seconde du président de l’ANEMF (Association Nationale des Etudiants en Médecine de France).
Puis nous avons envoyé jusqu’à cinq relances aux non-répondants. En l’absence de réponse, un courrier a été envoyé en juillet 2015. En septembre 2015, nous avons envoyé un e-mail avec nos premiers résultats, encourageant les bureaux des Doyens à nous retourner les corrections ou nouvelles informations qu’ils pensaient que nous devions inclure dans l’enquête, avec une nouvelle relance par e-mail en octobre 2015. Puis nous avons envoyé nos résultats finaux aux Doyens en novembre 2015, leur donnant ainsi une nouvelle occasion de nous envoyer corrections ou modifications, avec une ultime relance en décembre 2015.
En plus de l’analyse des sites web et des contacts avec les bureaux des Doyens, nous avons cherché des informations complémentaires en utilisant nos contacts personnels et en contactant des experts du champ.
Nous n’avons pas conduit de recherche auprès des Centres Hospitaliers Universitaires, car ils ne sont pas sous l’autorité des Doyens des facultés, et notre recherche concerne les six premières années de formation médicale, avant le début de l’internat.
A partir des critères utilisés par Shnier et al. [3], nous avons élaboré un système de points adapté au contexte français. Deux critères, les échantillons de médicaments et le soutien des industriels au paiement des droits d’inscriptions par les étudiants, ont été écartés de notre liste. Les échantillons sont interdits en France [26], et les industriels ne soutiennent pas les inscriptions des étudiants parce que la formation se fait dans des facultés publiques.
En France, les facultés de médecine peuvent recevoir des aides des entreprises à travers la taxe d’apprentissage. Cette taxe imposée par l’État sert principalement à financer la formation professionnelle. Ce type de financement peut influencer les décisions et l’indépendance des facultés de médecine. Les firmes pharmaceutiques procurent aussi des soutiens éducatifs aux internes en médecine, en les aidant pour la publication d’articles scientifiques. Cela peut jouer un rôle important dans la carrière d’un docteur, ce qui justifie de le prendre en considération. Enfin, une part importante de l’apprentissage de la médecine se fait dans les hôpitaux universitaires. Nous avons choisi de suivre l’exemple de l’AMSA [1], en incluant un critère spécifique qui concerne la promotion, par les facultés de médecine, de l’adoption par les CHU de politiques de lutte contre les conflits d’intérêts (critère 13 ci-dessous)
Les dix premiers critères ci-dessous sont aussi utilisés par Shnier et al. [3]. Nous avons ajouté les trois derniers critères, numérotés de 11 à 13.
Conformément à l’approche choisie pour le tableau de bord de l’AMSA et dans Shnier et al., nous avons aussi pris en compte les éventuelles procédures visant à favoriser la surveillance et la mise en place de politiques. Nous avons évalué deux aspects de la surveillance et de la mise en place: 1) l’existence claire d’une autorité responsable du contrôle général de conformité des pratiques avec les règles, et 2) l’existence de sanctions en cas de non-respect. Chacune de ces mesures en faveur de la mise en application était codée en « oui » ou « non ». Nous n’avons pas cherché à savoir si les politiques avaient été violées, ou à mesurer la sévérité des sanctions.
Nous avons associé à chaque critère une échelle de 0 à 2, où 0 correspond à l’absence de politique ou à une politique permissive, 1 à une politique modérée, et 2 à une politique restrictive (voir la fin du document pour le détail du codage de chaque critère). Les politiques de chaque faculté de médecine ont été codées par deux personnes sans concertation , puis le groupe de l’ensemble des codeurs a contrôlé les résultats de ce travail, et les divergences ont été résolues par la discussion. Comme Shnier et al. [3], nous avons sommé les notes des 13 premiers critères individuels pour les chaque faculté, arrivant ainsi à une note globale comprise entre 0 et 26. Chaque critère avait le même poids.
Système de notation globale
Pour les notes apparaissant dans le tableau présenté sur notre site, nous avons choisi le même système basé sur une classification de type A,B,C que l’AMSA.
Comme l’AMSA, la note A correspond à des politiques estimées excellentes, avec un score supérieur ou égal à 85 % du score maximum (soit 22 points ou plus). La note B équivaut à des politiques modérées, avec un score supérieur ou égal à 72 % (soit entre 19 et 22 points), C est obtenu avec un score supérieur ou égal à 56 % (soit entre 15 et 19 points) pour des politiques faibles. Les facultés ayant moins de 15 points reçoivent la note D. Enfin, les facultés pour lesquelles nous n’avons trouvé aucun résultat et pas eu de réponse reçoivent la note I (pour incomplet). Elles sont invitées à nous communiquer leurs mesures afin que nous puissions en tenir compte dans les classements à venir.
Cet article correspond pratiquement à la partie méthodologie de l’étude Conflict of Interest Policies at French Medical Schools : Starting from the Bottom, réalisé par le Formindep et publié en ligne par PLOS ONE. Pour les références, veuillez vous référer à l’article original.
Système de notation pour les catégories
(Adapté de Shnier A, Lexchin J, Mintzes B, Jutel A, de Holloway K (2013) Trop peu, trop faible: Politiques sur les conflits d'intérêts dans les écoles de médecine canadiennes PLoS ONE 8 (7): e68633)
1. Cadeaux (incluant les repas)
- 2 = Tous les cadeaux et les repas sur place financés par l'industrie sont interdits, indépendamment de la nature ou de la valeur.
- 1 = Limitation moins stricte des dons financés par l'industrie (Cadeaux interdits au-dessus de 50 € / an – ou cadeaux interdits mais repas autorisés par exemple)
- 0 = Pas de politique, ou politique qui ne réduirait pas substantiellement les dons (par exemple, les cadeaux sont autorisés mais découragés, ou limités de façon non spécifique, ou principalement au bénéfice des patients).
2. Relations de consulting (à l'exclusion de la recherche scientifique et des conférences)
- 2 = Les relations de consulting avec l'industrie doivent faire l'objet d'un examen ou d'une approbation institutionnelle. En outre, ils doivent être décrits dans un contrat formel, ou le paiement des services doit être proportionnel à la tâche.
- 1 = Comme ci-dessus, mais sans l'exigence d'examen ou d'approbation institutionnelle.
- 0 = Pas de politique, ou politique permettant aux relations de consulting de se produire sans examen institutionnel ou qui permettrait des relations dans lesquelles les paiements ne sont pas proportionnels au travail.
3. Services de conférencier financés par l'industrie / bureaux de conférenciers
- 2 = Les services de conférenciers sont empêchés de fonctionner de facto comme des cadeaux ou du marketing. Une politique efficace ne doit pas implicitement permettre (a) des ententes à long terme en tant que conférencier (b) et que l'industrie ait un rôle dans la détermination du contenu des présentations. (Certaines politiques efficaces peuvent interdire explicitement la participation à un bureau de conférenciers. D'autres politiques efficaces contiennent des éléments tels que des limites à l'indemnisation et au remboursement et une exigence d'assurer l'intégrité scientifique des renseignements présentés).
- 1 = Les services de conférencier financés par l'industrie sont réglementés, mais avec des limites moins strictes sur la longévité, le contenu ou la compensation.
- 0 = Aucune politique ou politique qui ne définit pas les limites de la longévité, du contenu ou de la rémunération.
4. Honoraires
- 2 = Absence d'acceptation d’honoraires provenant de l’industrie pharmaceutique. Les défraiements doivent être à la juste valeur marchande et être publiquement divulgués.
- 1 = Limites dans l'acceptation / la divulgation des honoraires.
- 0 = Aucune politique, ou aucune limite dans l'acceptation.
5. Ghostwriting (Signature d’articles rédigés par l’industrie pharmaceutique)
- 2 = Le ghostwriting n'est pas autorisé.
- 1 = Peu ou pas de restrictions; La gestion est laissée à la discrétion individuelle.
- 0 = Pas de politique.
6. Déclaration des liens d’intérêt
- 2 = Pas de conflit d'intérêts accepté pour les membres du corps professoral, (sauf s'il n'y a pas d'autre alternative)
- 1 = Le personnel doit divulguer les liens financiers passés et présents avec l'industrie (Services de consulting et conférences, subventions de recherche par exemple) sur un site Web accessible au public, et / ou divulguer ces relations aux étudiants lorsqu'une telle relation pourrait représenter un conflit d'intérêts apparent .
- 0 = Pas de politique.
7. Représentants commerciaux de l'industrie
- 2 = Les représentants des industries pharmaceutiques et des produits de santé ne sont pas autorisés à rencontrer le corps enseignant quel que soit l'endroit où ils se trouvent ou ne sont pas autorisés à commercialiser leurs produits à l'intérieur du centre médical et des cliniques et bureaux associés. (Des exceptions peuvent être apportées à des fins non commerciales, telles que la formation sur des appareils ou des équipements.)
- 1 = Les représentants des produits pharmaceutiques sont autorisés à rencontrer le personnel enseignant, mais avec des limitations importantes (par exemple, seulement dans les zones de soins sans patients, ou seulement sur rendez-vous). Exceptions comme ci-dessus.
- 0 = Aucune politique ou politique qui ne limite pas l'accès de façon sensible.
8. Activités d'éducation à la faculté
- 2 = L'industrie n'est pas autorisée à fournir un soutien financier direct aux activités éducatives, y compris l'éducation médicale continue (CME), directement ou par l'intermédiaire d'une agence subsidiaire. (Cependant, les entreprises peuvent verser des fonds non affectés à un fonds central ou à un organisme de surveillance au centre médical universitaire, lequel, à son tour, regrouperait et distribuerait des fonds pour des programmes indépendants de tout apport ou contrôle de l'industrie).
- 1 = Restrictions moins strictes pour assurer l'indépendance du contenu éducatif (par exemple normes visant à éviter l'influence de l'industrie sur le contenu, comme l'examen et l'approbation des présentations, le choix d'une langue qui empêche l'industrie de choisir le conférencier, ou une langue telle que : les fonds sont dédiés par l'industrie à un sujet particulier, mais doivent être fournis directement au ministère, et non aux particuliers).
- 0 = Pas de politique ou une politique qui ne limiterait pas sensiblement l'influence de l'industrie sur les activités éducatives (par exemple, le financement de l'industrie doit être divulgué).
9. Indemnisation pour les déplacements ou la participation aux conférences et réunions à l’extérieur de la faculté
- 2 = Le personnel ne peut accepter le paiement, les cadeaux ou le soutien financier de l'industrie pour assister aux conférences et aux réunions (une exception peut être faite pour les repas modestes, s'ils font partie d'un programme plus vaste.) Le défraiement ne peut être accepté que s'il est soumis à l'approbation de l'établissement ou si l'industrie est empêchée de sélectionner les destinataires. Remarque: les services de consulting et de conférencier sont évalués séparément dans d’autres catégories).
- 1 = Limitations moins strictes.
- 0 = Aucune politique ou une politique qui ne limiterait pas de façon substancielle la participation à des événements et réunions financés par l'industrie.
10. Le curriculum des écoles de médecine (ou toute autre documentation sur les objectifs éducatifs / le contenu des cours)
- 2 = Les élèves sont formés pour comprendre les politiques institutionnelles en matière de conflits d'intérêts et reconnaissent comment la promotion de l'industrie peut influencer le jugement clinique.
- 1 = Le programme traite les conflits d'intérêts d'une manière plus limitée (par exemple, la formation sur les politiques seulement).
- 0 = Pas de politique (non traitée dans le programme ou ailleurs).
11. Financement de l'école de médecine par l'industrie pharmaceutique.
- 2 = Pas de financement accepté
- 1 = Le financement est accepté, mais un montant fixe est limité, avec une attention particulière afin que ce financement n'interfère pas avec la mission de l'école de médecine pour éduquer et protéger ses étudiants contre les influences pharmaceutiques.
- 0 = Aucune politique ou politique qui ne limite pas substantiellement l'accès.
12. Soutien éducatif de l'industrie aux internes pour la publication d'articles scientifiques.
- 2 = La Faculté de Médecine n'accepte pas l'aide à la publication de la part des compagnies pharmaceutiques pour ses étudiants; Ou les facultés sont tenues d'informer leurs étudiants sur les antécédents et les conséquences potentielles de l'acceptation de cette «aide» fournie par les entreprises pharmaceutiques. L'école de médecine s'engage à fournir une formation adéquate dans ce domaine à ses étudiants.
- 1 = Politique moins sévère
- 0 = Pas de politique
13. Activités des facultés de médecine visant à promouvoir les politiques d'assurance-maladie dans les hôpitaux d'enseignement affiliés.
- 2 = Politique active visant à encourager d'autres lieux de formation, en particulier les hôpitaux d'enseignement, à respecter et à suivre la politique de l'école de médecine.
- 1 = Politique moins sévère
- 0 = Pas de politique
14. Exécution
- R. Est-il clair qu'il y a une partie ( un comité?) responsable de la supervision générale pour assurer la mise en place des politiques définies ? (O / N)
- B. Est-il clair qu'il y a des sanctions prévues dans la cas où ces mesures ne seraient pas appliquées ? (O / N)